Opinion Geert Gielens: Marché des capitaux , l’éléphant dans la pièce

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Concernant les marchés financiers, l'Union européenne est un tigre de papier. Au regard de tous les besoins de financement à venir, cette situation est fort préoccupante. Nous avons dès lors tout intérêt à ce que l'argent européen reste sur le marché européen et soit utilisé pour financer des entreprises et des projets européens. Mais il en va autrement aujourd'hui : des milliards d'euros s'envolent chaque année pour être investis ailleurs.

 

Un marché européen des capitaux véritablement intégré pourrait être le rempart dont nous avons besoin ici.  

L’attention actuelle portée au fonctionnement du marché des capitaux est une bonne chose, tout comme la volonté affirmée de développer ce marché en Europe. Sans un marché européen des capitaux fort et stable, on n'a pas d'autonomie stratégique et il est difficile, voire impossible de financer nos projets. Concernant les marchés des capitaux, il y a cependant plus d’un « éléphant dans la pièce » et si vous ne travaillez que sur la structure de ces marchés, vous risquez la douche froide. 

 

Car le marché européen est actuellement totalement fragmenté par des règles et des lois nationales. Même les questions importantes pour les investisseurs, telles que les droits visant l'insolvabilité, la protection des consommateurs, la fiscalité ou la nature de la forme sociale, diffèrent d'un pays à l'autre. Ainsi, quel citoyen ordinaire peut encore investir en connaissance de cause dans le projet d'une PME d'un autre pays européen ? Vous ne savez pas quels risques vous courez et il faut copieusement se démener pour obtenir et traiter les bonnes informations. Une harmonisation de toutes ces différences est donc nécessaire. Et pour ce faire, la législation au niveau européen est cruciale. 

 

Si nous voulons que les investisseurs européens investissent en Europe, il faut aussi qu’à leurs yeux, les entreprises européennes présentent à tout le moins autant d’attraits que les américaines. Il faut donc des entreprises dont le potentiel d'appréciation du cours de l'action est au moins aussi important que celui des sociétés américaines et qui opèrent sur des marchés en réelle croissance. Et là, une seule conclusion s’impose : il y a moins d'entreprises de ce type en Europe. En fait, nous avons même complètement raté le train de la révolution des technologies de l'information. En Europe, nous devons donc donner à nos entreprises une plus grande marge de manœuvre pour innover. Nous avons besoin de politiques qui facilitent le développement des produits et des entreprises et qui réglementent moins. Sans entreprises dans lesquelles les investisseurs croient, l'argent s'en ira toujours ailleurs, que nous ayons ou non un marché des capitaux hyperefficace.

 

Enfin, le goût du risque joue également un rôle non négligeable. Si nous voulons que les entreprises et les projets soient davantage financés par les marchés des capitaux, il faut aussi que les investisseurs soient prêts à s’immerger dans les informations nécessaires et à assumer le risque inhérent à leur investissement. Comparé à l'investisseur américain, l'Européen n'est tout simplement pas un grand amateur de risques. Il est clair que l'Europe a besoin de plus d'éducation financière. 

 

En résumé, il est bon et absolument nécessaire d'améliorer le fonctionnement des marchés des capitaux en Europe. Mais cela doit s'accompagner d'une politique visant non seulement à améliorer le fonctionnement de l'ensemble de l'offre économique, mais aussi à promouvoir l'éducation financière afin que les investisseurs apprivoisent les connaissances nécessaires pour oser tirer parti des opportunités offertes par ce marché des capitaux intégré et ces entreprises européennes innovantes.

 

Geert Gielens, Chief Economist chez Febelfin