Le CEO de Febelfin, Karel Baert, partage sa vision de l'impact économique de la crise corona. Curieux ? Lisez l'article d'opinion çi-dessous.
Au cours de l'année écoulée, la pandémie et ses ravages ont abouti à une crise systémique profonde. Afin de préserver au mieux notre santé, le gouvernement a pris des mesures drastiques justifiées pour limiter les contacts entre les personnes : le télétravail a été rendu obligatoire, des entreprises et des commerces ont été fermés et une restriction de circulation a été introduite. Dans la mesure où notre économie repose sur le contact humain, au travers du commerce, du travail en entreprise ou des voyages, la crise sanitaire s'est automatiquement transformée en crise économique.
Les chiffres et statistiques de la Banque nationale de Belgique montrent que l'impact a été énorme. Au cours du premier semestre 2020, la valeur totale que nous créons normalement a été inférieure d'environ 15 % à celle de l'année précédente. Pour l'ensemble de l'année 2020, la perte est estimée à un peu moins de 7 %. Concrètement, cela signifie que nous ne retrouverons que vers la fin de l'année 2022 le niveau de prospérité que nous avions en 2019. Trois années de travail auront été perdues et pour certaines personnes et certains secteurs, il sera très difficile, voire impossible de compenser cette perte.
Afin d’essayer d’endiguer la déferlante qui allait s’abattre sur les entreprises, le gouvernement est intervenu massivement au travers de mesures de soutien destinées aux travailleurs, aux indépendants et aux entreprises. Concernant les crédits, cette intervention a consisté entre autres, à développer, de concert avec le secteur bancaire, des systèmes de garanties publiques pour les crédits et à accorder des reports de paiement pour les remboursements de capital.
Il n'y avait guère de conditions pour bénéficier de ces mesures : il suffisait de démontrer que l’entreprise était viable avant le déclenchement de la pandémie et que ses problèmes de paiement étaient consécutifs à la crise.
Pour une crise dont tout le monde savait qu'elle serait très grave, mais dont personne ne savait ni qui ni quoi elle affecterait, quelle serait l'ampleur des dégâts qu’elle occasionnerait et combien de temps elle durerait, il s’agissait de bonnes mesures : massives, générales et presque inconditionnelles. Les réactions de panique sur les marchés monétaires professionnels ont donc été quasi inexistantes. Il est frappant de constater qu'en 2020, année de la crise, le nombre de faillites a diminué de 30 % par rapport à l'année précédente.
La question que nous devons maintenant nous poser est de savoir si le type de mesures qui nous ont permis de traverser la première vague exceptionnellement dure de la crise est encore le plus approprié aujourd'hui. La situation d’urgence dans le secteur de la santé n'est assurément pas terminée, et il n'y a même pas de date de fin réelle en vue.
Mais les chiffres montrent que, dans l'ensemble, le deuxième lockdown nous a touchés beaucoup moins durement sur le plan économique, même si les secteurs où les contacts humains sont nombreux ont à nouveau été particulièrement touchés. De ce point de vue, nous ne sommes donc pas exactement dans la même situation aujourd'hui qu'à la mi-mars.
Nous avons maintenant une connaissance et une expérience des conséquences financières et économiques de cette crise et, lorsque cela était possible, les entreprises elles-mêmes ont pris des mesures pour renforcer leur résilience. Dans l'intervalle, des instruments sont toujours en cours d'élaboration pour fournir des capitaux et des prêts si nécessaire. Nous sommes donc un peu mieux armés qu'au début de la crise, mais même ainsi, de nombreux problèmes dans les entreprises individuelles n’ont pas encore fait surface.
Une approche plus ciblée et plus individuelle des entreprises en difficulté est donc désormais une démarche indispensable et urgente. Un dialogue constructif entre la banque et l'entreprise, initié par l’une ou par l’autre, est le meilleur moyen de maintenir à flot les entreprises viables dans cette tempête économique.
Des solutions à la mesure des entreprises individuelles sont absolument essentielles. Car chaque entreprise est différente. Et grâce à une approche individualisée, en collaboration avec la banque, il est possible de rechercher les meilleures solutions structurelles pour chaque entreprise, assurément en vue d'un éventuel octroi de crédit, mais aussi afin de renforcer ses ressources propres. Avec un objectif, celui de sauver le plus grand nombre possible d'entreprises, qui pourront alors se recentrer sur l'avenir.
D'où mon appel à toutes les entreprises bénéficiant de mesures de soutien : n'attendez pas l'expiration de ces mesures dans quelques mois, mais contactez votre banque dès que possible. Sans reporter à demain.
C'est là la seule manière de sauver le plus grand nombre d'entreprises et de faire ensemble un premier pas vers l’indispensable redémarrage durable de notre économie.
- Karel Baert, CEO Febelfin