8 octobre 2019 - 5 min de lecture
La rédaction de la VRT rapporte aujourd'hui que certains clubs de football, principalement aux mains de propriétaires étrangers, éprouvent des difficultés à ouvrir un compte bancaire. Quel est le problème ?
Depuis l'été dernier, les banques belges, comme leurs homologues européennes, réévaluent leurs relations avec les clubs de football. La raison en est un rapport annuel de la Commission européenne sur l'évolution des risques de blanchiment de capitaux en Europe. Ce rapport est un fil conducteur dont les banques doivent tenir compte dans leur politique de lutte contre le blanchiment d'argent.
European Commission, Report on the assessment of the risk of money laundering and terrorist financing affecting the internal market and relating to cross-border activities:
Depuis quelque temps déjà, ce rapport annuel épingle les clubs de football professionnels comme constituant un secteur à risque. La Commission européenne signale en substance, entre autres, que l’organisation complexe du football professionnel et le manque de transparence ont créé un terreau fertile pour l'utilisation de moyens illégaux. Des sommes d'argent douteuses sont investies dans le sport sans produits ou bénéfices financiers clairs et compréhensibles.
Le problème est connu depuis longtemps. En 2009 déjà, des organismes internationaux tels que le Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) ont mis en garde contre les risques posés par le secteur du football en termes de blanchiment d'argent et de pratiques illégales.
FATF, Money laundering through the football sector:
Les banques sont tenues d'étudier ces rapports et d'en tenir compte dans leur politique de lutte contre le blanchiment d'argent. Si un club de football ne peut pas expliquer exactement l'origine de ses fonds, ou s'il y a des indications que certains flux de capitaux peuvent provenir d'activités illégales, les banques ne sont pas autorisées à accepter ces fonds, et elles sont tenues d'en informer la Cellule anti-blanchiment. Parfois, une banque peut se voir contrainte de mettre un terme à ses relations avec un club de football, dès lors qu’elle court le risque de participer elle-même à un blanchiment d'argent. Toutefois, la banque doit agir avec précaution et procéder à une analyse approfondie des risques.
Les banques qui ne font pas preuve de prudence en la matière s'exposent à de lourdes amendes pouvant aller jusqu'à 10 % de leur chiffre d'affaires mondial et à des condamnations pénales. Et ces condamnations sont réellement suivies d’effets, comme on a pu le voir dans des cas récents (ING Nederland, Danske Bank, etc.). Les banques ne peuvent donc se permettre aucun faux-pas.
En tant que secteur, nous n'avons pas nous-mêmes une vue concrète de l'ampleur des problèmes qui sont signalés. Le secteur bancaire est, bien entendu, disposé à examiner comment contribuer à résoudre ces problèmes. Mais les fédérations et les clubs devront eux aussi consentir de sérieux efforts pour faire comprendre qu'ils prennent au sérieux les bonnes pratiques commerciales. Une prise de conscience plus pointue, davantage d'échanges de bonnes pratiques, des procédures plus strictes et un meilleur soutien de la part des fédérations sont indispensables. Dans le cas contraire, c'est tout le secteur du football qui risque d’être victime de la situation.